Qu'est- ce qu'un Stan ?
Cette semaine, j’ai envie de vous parler un peu de l’origine du mot “Stan”. Pour les plus jeunes d’entre vous, il est possible que ce soit un mot que vous employiez couramment sans en connaître la signification d’origine et quand il a été utilisé pour la première fois. Pour ceux qui ne connaîtraient pas la signification de ce mot et/ou ne l’auraient jamais entendu ou lu, le mot “stan” est utilisé aujourd’hui comme nom commun pour désigner les fans inconditionnels d’un artiste. Depuis quelques années, les fans de Kpop (abréviation de Korean pop) se le sont approprié, avec le boys band de kpop le plus connu, BTS, appelant sa communauté les “stan”. De plus, ce mot qui était d’abord utilisé comme un nom commun est aussi utilisé aujourd’hui en tant que verbe pour désigner le fait d’être un stan. Pour les lecteurs les plus sages ( je trouvais “vieux” trop péjoratif), si vous deviez utiliser le terme dans une conversation de votre époque, cela donnerait : “ Je suis absolument fan de Daniel Balavoine, je le stan !”.
Cependant, l’origine du mot est beaucoup plus sombre. En effet, le premier à l’avoir utilisé est le rappeur Eminem, qui a connu le pic de sa célébrité dans les années 2000. Dans une de ses chansons, il nous narre l’histoire (d’après lui fictive) d’un de ses fans les plus virulents qui essaye de communiquer avec le rappeur à travers de lettres qu’il lui envoie. Ce fan se fait appeler Stan et, au travers ses lettres, exprime ses émotions à Eminem. Il raconte d’abord comment il a eu le cœur brisé au moment où le rappeur l’a ignoré alors qu’il l’attendait à la sortie de son concert ou comment il se reconnait tant dans ses musiques. Cependant, au fur de la musique, l’auditeur se rend compte que Stan commence à avoir un comportement extrêmement apeurant : il exprime des envies autodestructrices et se ferme totalement au monde pour vivre pleinement sa relation prétendue avec le rappeur. Je ne vais pas vous résumer toute l’histoire de la chanson ; je vous recommande d’ailleurs d’aller écouter ce chef d’oeuvre qui risque bien de vous donner des frissons. Pour autant, ce texte aborde un sujet qui, depuis les années 60 avec la Beatlemania, n’a fait que de prendre de l’importance : les relations parasociales.
Les relations parasociales désignent le fait d’être convaincu d’une relation totalement imaginaire avec quelqu’un. Bien sûr, le cas de Stan n’est pas un cas isolé : les cas de ce qu’on appelle le stalking (fait de suivre quelqu’un physiquement ou numériquement pour tout savoir de sa vie) sont quotidiens pour de nombreuses stars. Parfois même, ces fans obnubilés passent à l’acte et commettent des atrocités, toujours convaincus que leur relation avec leur idole est réelle. Les causes de ces dérives ont beaucoup été étudiées et, même si aucun consensus sur ces dernières n’a été établi, une majorité de scientifiques s’étant penché sur le sujet considère que les réseaux sociaux et la surexposition médiatique sont tout autant de choses venant amplifier le phénomène de nos jours.
Ainsi, à la lumière de ces informations, le mot “stan”, utilisé aujourd’hui après qu’Eminem l’ait démocratisé, exprime bien tous les risques de l’idolâtrie et de la surexposition médiatique dans notre monde moderne. Bien sûr, comme dans toute langue, c’est l’usage qui fait la norme. Donc si les gens aujourd’hui remplacent le mot “fan” par “stan”, ils n’y apportent pas forcément la connotation très négative qu’il possédait à l’époque. Pour autant, il est important de relativiser notre relation aux célébrités en se rappelant que même les personnes qui exposent leur vie sur les réseaux sociaux ne sont pas forcément nos amis et que même si nous les connaissons, eux ne nous connaissent pas. C’est aussi le cas avec les youtubers et autre personnalités d’internet qui nous parlent presque directement à travers la caméra. Même si la plupart n’a aucun problème à accepter de discuter ou prendre des photos dans la rue, ils restent des humains comme les autres. Il peut y avoir des situations non propices à des intéractions avec leurs fans et ils ont le droit de ne pas toujours être exactement comme vous les voyez derrière votre écran. Ainsi, comme avec tout autre être humain, n’importe quelle interaction doit se faire dans le respect.